Chilowé : la vraie définition du nurturing
N° 37 - Mettre 150 000 personnes dehors, tous les jeudis.
Vous lisez l’Encrier — le média qui analyse les stratégies des meilleures newsletters pour vous aider à développer la vôtre. Un lundi sur deux (with love). ❤️
En novembre 2024, je claquais la porte de mon petit appartement Lyonnais pour devenir Haut-Savoyard. Troquer les barres d’immeubles contre les barres rocheuses a été ma plus belle affaire jusqu’ici.
Petits, mes parents nous emmenaient très souvent en montagne, ma petite fratrie et moi. J’adorais ça, l’air frais, les nuits dehors, les mollets qui chauffent. J’ai enfoui cette passion des grands espaces pendant mes études, je pensais l’avoir perdu. Elle est revenue me péter à la figure en 2020. Un jeudi 15 octobre pour être exact.
Un ami me parle de Chilowé, un média qui pousse ses lecteurs à passer plus de temps dehors. Ce média défendait une pratique que je n’avais jusqu’alors entendu nulle part ailleurs : la microaventure.
La microaventure, c’est l’idée selon laquelle nous n’avons pas besoin d’aller au bout du monde pour vivre des choses extraordinaires. C’est l’idée qu’une paire de chaussures, un sac à dos, un weekend et des copains suffisent très largement pour s’éclater. La microaventure, c’est prendre conscience qu’on a tous un terrain d’exploration derrière chez nous.
Dans ce premier mail, Chilowé m’écrivait alors : “On n’a rien inventé et la plupart d’entre vous ne nous avez pas attendus pour apprendre à monter une tente, mais tout ce qu’on vous propose va vous inciter à le faire plus souvent.”
J’ai signé direct.
Depuis cette date, je n’ai loupé (presque) aucune éditions de leur newsletter. Je les ai vu évoluer, changer de ligne éditoriale, retravailler le design, essayer de nouvelles rubriques. Mais ils ont toujours tenu leur cap : donner envie à leurs lecteurs de passer plus de temps dehors.
Cette approche sur la durée, c’est ce qu’on appelle le nurturing. Par le prisme de la newsletter de Chilowé, on va décortiquer cette stratégie et chercher à comprendre comment l’appliquer au mieux pour votre propre média.
Ma grande question : “Comment Chilowé utilise le nurturing pour “nourrir” leurs quelque 150 000 lecteurs, toutes les semaines, depuis des années ?”
Ce sera tout le sujet de ce 37ᵉ numéro de l’Encrier.
Bonne lecture,
Mathis. ✌️
Zoom sur une stratégie qui vaut le détour et ce qu’on peut en retirer.
Le nurtu-quoi ?
Le nurturing — nom un peu barbare, j’avoue — est une stratégie qui consiste à entretenir et à renforcer la relation avec les prospects qui ne sont pas encore prêts à acheter. En leur envoyant régulièrement du contenu utile, on les accompagne progressivement vers la décision d’achat.
En gros, c’est pertinent pour les marques qui vendent des produits ou services qui :
Requièrent une longue réflexion (prix élevé ou engagement long)
Demandent de l’éducation, ou de la déconstruction d’idée
Nécessitent de la récurrence.
Le nurturing permet donc de “chauffer” l’audience pour lui faire passer des paliers de “maturité”.
On accompagne les lecteurs d’un point A à un point B, jusqu’à ce qu’ils décident par eux-mêmes de passer à l’action. Cette approche douce du marketing est, je crois, ce dont tout le monde a besoin aujourd’hui — loin, très loin de l’emailing promotionnel de masse des années 2000.
Chilowé, la maîtrise de la valeur éditoriale
Chilowé est à l’origine une entreprise 100% média. Comme tout média qui se respecte, son modèle économique est principalement basé sur le sponsoring. Mis à part la vente de petits produits complémentaires, l’audience n’a pas vocation devenir cliente.
Le petit twist arrive en 2022, lorsqu’ils lancent le “Club Chilowé” : une agence de voyage spécialisée dans les aventures bas-carbone en France et proche Europe. D’un média d’inspiration, Chilowé ajoute la corde “acteur du tourisme responsable” à leur arc. Et ça cartonne. Les 150 000 lecteurs de la newsletter reçoivent depuis 2017 du contenu qui les accompagne petit à petit à devenir des micros-aventuriers, sans rien attendre en retour. Destinations de la semaine, dossiers thématiques, idées d’aventures en autonomie, récits d’aventures, recommandations de produits et services. Tous les éléments sont réunis pour nourrir cette petite flamme d’aventure qui sommeille en nous.
Imaginez : lorsque Chilowé annonce à sa communauté qu’il est désormais possible de partir en micro-aventure avec une offre clé en main, ils ne font donc que concrétiser un besoin qu’ils ont contribué à renforcer. À l’inverse, si l’agence de voyage avait été créée avant le média, leur audience n’aurait pas été assez familière avec la notion de micro-aventure. Et le projet aurait probablement floppé. Là est toute l’importance du nurturing.
On retombe tranquillement sur nos pattes. 🐈
Vendre un style de vie
Si vous vous lancez dans une stratégie de nurturing à la manière de Chilowé, il y a une chose importante à comprendre : chercher à vendre indirectement son produit à chaque ligne, ça se voit, et ça braque. Essayez plutôt de vendre une vision du monde dans laquelle votre produit ou service s’intégrerait parfaitement.
Chilowé, au hasard, ne parlent jamais des avantages de partir “avec un guide” VS “en autonomie” pour vendre leurs micro-aventures. Ils vendent plutôt l’idée selon laquelle un autre mode d’aventure est possible, plus près, plus simple, plus économe et plus écologique. Une fois que leur communauté adhère à cette vision, Chilowé n’a plus besoin de pousser leurs offres d’aventures. Leurs lecteurs s’y inscrivent naturellement.
Si on reprend notre schéma (plus haut), le nurturing passe par 3 étapes :
🙋♂️ Le lecteur découvre Chilowé (cf : moi en 2020). Il pense à ce moment-là que :
L’aventure est réservée à des Mike Horn,
L’aventure se vit uniquement dans des destinations reculées et hostiles,
L’aventure nécessite beaucoup d’équipements.
📚 Chilowé lui envoie du contenu régulièrement (phase de nurturing) avec pour objectif de :
Déconstruire sa vision de l’aventure, voire même du voyage,
Lui montrer qu’il existe un autre chemin : celui de la micro-aventure,
Réduire la friction à passer le cap et montrer que c’est accessible.
🦸 Le lecteur est prêt, il sait maintenant que :
Il n’a pas besoin de partir à l’autre bout du monde pour vivre des expériences extraordinaires,
L’aventure est accessible à tous, partout, tout le temps,
La Chartreuse vaut mille fois le Yosemite.
Chilowé n’est d’ailleurs pas la seule entreprise à vendre une vision plutôt qu’un produit. Spoune vend un monde où l’intelligence financière est accessible à tous (j’en parlais dans cette édition) ; Pomad parle d’un monde où l’eczéma n’est plus un frein au bien-être ; Green-Got défend un monde où votre argent a enfin de l’impact sur cette planète (en bien).
Regardez votre marketing et posez-vous la question : est-ce que vous vendez un produit ? Ou est-ce que vous vendez une nouvelle manière de voir ce monde ?
Aller plus loin
Dans un monde parallèle — où on aurait pu se permettre l’audace de proposer des axes d’améliorations à l’une des meilleures newsletters du marché — voici comment Chilowé pourrait aller encore plus loin :
1. Segmenter par zone géographique
Et si Chilowé s’inspirait de Koh Lanta les 4 Terres (mais sans Denis) ? L’idée est simple : segmenter son audience par grandes zones en France (Nord, Sud, Est, Ouest) et personnaliser les contenus envoyés. Pour un marseillais cherchant à partir pour sa première aventure, recommander des spots en Normandie est un trop gros gap à passer. Alors qu’un trek de 3 jours dans les Cévennes est plus envisageable. On garde toujours le même projet : aider les lecteurs à passer plus de temps dehors. Et plus le nurturing est personnalisé, plus il est efficace.
2. Lettres d’aventure
Et si Chilowé imaginait une rubrique dédiée aux lettres écrites par les abonnés lors de leur dernière aventure ? Ca permettrait d’ajouter de l’émotionnel, de changer de plume, et de donner envie aux autres lecteurs de vivre des aventures à leur tour. Ici, Chilowé sort de l’équation et n’est plus qu’intermédiaire. La newsletter devient alors un lieu d’expression et plus seulement un outil de prescription.
3. Une micro-newsletter éphémère
Et si Chilowé proposait une série d’emails sur une thématique spécifique, en fonction des besoins de ses lecteurs. On peut imaginer par exemple “10 jours pour faire son premier bivouac”. Durant 10 jours, les lecteurs inscrits recevront quotidiennement des inspirations, mini-défis, récits d’aventure, anecdotes, et autres contenus autour du thème de la “nuit dehors”. De quoi aller un peu plus loin dans le concret.
4. Des audios de nature
Et si Chilowé sortait ses lecteurs de leurs open-space ? Celle-ci, c’est un petit bonus. En ajoutant en un audio de nature au début de chaque édition, Chilowé pourrait nous plonger encore un peu plus dans son univers (et nous donner envie). Des bruits de vagues pour du bikepacking dans le Morbihan, des sons de forêt pour une édition sur le trek dans le Jura. Déjà qu’on s’y croyait déjà, là, on y est carrément.
De l’inspiration à la louche — les trucs cools récemment publiés sur la toile.
1️⃣ La Cohorte est un autre exemple que je donne quand je parle de bon Nurturing. LE “podcast des freelances” m’a aidé à passer beaucoup de caps dans le développement de mon activité. J’étais d’ailleurs passé au micro de Marine pour parler de mon parcours. Si vous en avez marre de me lire et que vous voulez entendre ma douce voix, je vous invite à aller y jeter une oreille. → Par ici.
2️⃣ Chilowé a lancé un concours de “prose” pour gagner des cartes-cadeaux Club Chilowé. Le projet : retourner sur les bancs de l’école et plancher sur un sujet de philo un peu remixé. 3 sujets, 6 000 signes max, format libre. Ce n’est même pas sponsorisé, j’ai juste trouvé le projet archi cool. À vos plumes ! → Par là.
3️⃣ Laura Pironnet lance “A Voix Haute”, une newsletter sur la littérature jeunesse. J’étais tombé sur le post de son lancement et j’avais trouvé l’idée géniale. La parti pris est super clair : repenser la littérature d’aujourd’hui pour porter les générations de demain. Je n’ai pas d’enfant, mais je suis (quadruple) Tonton, et je trouve ce média d’utilité publique. Filez le découvrir. → Par ici.
Votre droit de vote pour la suite de l’Encrier.
💣 1. Pourquoi les meilleures newsletters du marché passent 80% de leur temps sur “l’objet” — et comment en écrire de meilleurs ?
🦊 2. L’approche atypique de la newsletter de Green-Got, AKA “La Gazette du Renard”
🧙♂️ 3. Pourquoi va-t-on voir de plus en plus de newsletters de fiction (même en BtoB) ?
On se voit dans 15 jours !
Mathis ✌️
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PS : vous souhaitez passer votre newsletter un cran au-dessus ? Je propose deux types d’offres :
Pour les indépendants : un accompagnement individuel court ou moyen terme (plus d’infos ici)
Pour les marques : un audit poussé de votre newsletter avec le plan de route pour opérer les bons changements à horizon 1 mois, 3 mois, 6 mois, un an (plus d’infos ici).








Super intéressante cette édition, merci ! Vendre une vision du monde plutôt plutôt ses produits. A garder en tête oui...
Les 3 propositions de sujets sont pertinentes selon moi !